Madeleine Vionnet et la presse féminine, 1926

Vu la somme de documents disponible, je vais faire un post par année pendant un temps (on n’a pas fini de regarder des robes).

Madeleine Vionnet

En 1926, on parle toujours de la robe présentée à l’exposition des Arts Décoratifs qu’on a déjà vue dans le poste précédent.

L’illustration est d’Huguette Haendel Astruc, illustratrice et journaliste.

Les illustrateurs et illustratrices ont toujours la part belle dans les magazines.

Comme par exemple Annette Osterlind également connu sous le pseudonyme de Dartey, qui est une dessinatrice de mode, mais aussi une costumière pour le théâtre et le cinéma. J’aime beaucoup son travail.

Ou bien Eduardo Garcia Benito, dit Benito (1891-1981) qui est un illustrateur espagnol surtout connu comme dessinateur de mode.

Mais on trouve de plus en plus de photographies avec l’apparition de quelques grands noms.

Comme par exemple Edward Steichen (1879-1973) qui est un photographe et peintre américain d’origine luxembourgeoise. Éditeur de magazine, galeriste et conservateur du MoMA de New York de 1947 à 1962, il a été un trait d’union culturel entre les États-Unis et l’Europe.

Au moment qui nous intéresse, il évolue progressivement vers la photographie de mode. En effet, au début des années 1920, l’éditeur américain Condé Nast le choisit pour devenir le photographe en chef des publications du groupe, imposant ses exigences en matière de photographie : « La distinction, l’élégance et le chic. » Il travaille particulièrement pour Vanity Fair et pour Vogue, magazines pour lesquels il réalise notamment de nombreux portraits de célébrités, démontrant une grande capacité à mettre en valeur ses sujets, comme dans le cas de ce mannequin.

Ou bien George Hoyningen-Huene (1900 – 1968) qui est un des photographes de mode les plus fécond des années 1920 et 1930. Il passa sa vie en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis (dont il prit la nationalité). Après avoir débuté l’année précédente comme illustrateur pour Condé Nast, il devient, vers 1926, chef de la photographie pour Vogue Paris ; il y restera une dizaine d’années. Les images issues du studio sont destinées à l’édition française mais également américaine de Vogue, et il devient connu également de l’autre côté de l’Atlantique.

La présence plus importante de la photographie a aussi pour conséquence l’apparition plus importante des mannequins. Ces jeunes filles (et plus rarement jeunes hommes) qui sont là pour poser et mettre en valeur le vêtement et qui ne sont plus, ou rarement (contrairement aux années précédentes) des personnes de la haute société, des actrices ou des chanteuses.

Cela n’empêche pas les magasines de continuer à décrire les tenues des « dames du monde », avec peut-être de plus en plus d’emphases sur ce qu’elles ont pu faire et dire, commençant doucement à ressembler à notre « presse people » actuelle. Voici quelques unes de ces figures publiques.

Ici par exemple sont montrées les tenues de la comédienne Mary Marquet et de la chanteuse Marthe Chenal.

Mary Marquet est issue d’une grande famille d’artistes et comédiens et débutera sa carrière dans la troupe de Sarah Bernhardt et deviendra sociétaire de la Comédie-Française en 1928. Elle fera aussi du cinéma et de la télévision.

Marthe Chenal est une soprano d’opéra surtout active entre 1905 et 1923. Bien qu’elle ait chanté avec plusieurs compagnies d’opéra en France et dans le monde, sa carrière est principalement centrée au Palais Garnier et à l’Opéra-Comique à Paris. Elle était admirée pour son excellent chant, mais aussi pour ses spectaculaires prouesses dramatiques, certains critiques la comparant à Sarah Bernhardt. Elle a aussi été surnommée par la presse internationale « la plus belle femme de Paris ». Sa voix est conservée sur un certain nombre d’enregistrements faits avec Pathé en 1915.

Cette dame qui promène son chien, c’est Lady Henriette Davis, une philanthrope canadienne. Elle fonda en France plusieurs colonies de vacances pour enfants handicapés. Juive, elle retournera au Canada au début de la Seconde Guerre Mondiale, contribua financièrement à l’effort de guerre et créa un fonds pour les rescapés de l’Holocauste après la guerre.

Pour finir, ici, il s’agit de Marthe Lucie Lahovary, par mariage princesse Bibesco, également connue sous le pseudonyme de Lucile Decaux. C’est une femme de lettres française d’origine roumaine.

Autrice ayant écrit l’essentiel de son œuvre littéraire en français, son Perroquet vert, paru en 1924, sera suivi par toute une série de romans, de récits, de contes, de nouvelles, d’articles et d’essais. Elle sera élue en 1955 membre étranger de l’Académie royale de Belgique.

Enfin, on apprend des choses sur l’industrie du textile et de la mode. Par exemple, ici, le « lamé de Bianchini » fait référence à Bianchini-Férier, une manufacture de soierie fondée en 1888 à Lyon par l’association d’un créateur, Charles Bianchini, du technicien François Atuyer et du financier François Férier. Grâce à sa tradition de qualité et de création, la maison, qui s’installe en outre avenue de l’Opéra à Paris vers 1912, collabore rapidement avec les plus grands noms de la haute couture puis du prêt-à-porter, dont Worth, Poiret, Doucet, Jenny, Vionnet, Lanvin, Patou, Madame Gres , Carven, Paco Rabanne, Nina Ricci, Chanel, Dior, Yves Saint Laurent, Christian Lacroix, Jean Paul Gaultier, Hussein Chalayan, Anastasia, Dries Van Noten… L’essor de la maison s’appuie sur le génie créateur de Charles Bianchini. Celui-ci cultive d’une part la recherche de nouveaux procédés techniques : crêpe drap (créé en 1910), mousseline Madonna (la plus fine au monde, créée en 1904), velours façonnés, fabrication industrielle du crêpe et de la georgette, à l’époque du développement de l’usage du biais dans la couture…Les noms employés par Bianchini pour les tissus de la maison sont évocateurs d’exotisme et d’ailleurs, en particulier dans les années 1920 : crêpes Georgette, Romain, Korrigan, Sublime, Mireille ; soies Fulgurante, Soiebelle, Flaminga ; lamés Odalisque, Scarabée d’Or, Argentine, Silverine, Perles d’Argent ; matelassés modernes dont le Montaniador ; velours Frisson et Paradis…

Finissons cette année par une débauche de robes, manteaux, accessoires, et même un maillot de bain.

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